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mercredi 15 mai 2013
Dalaï Lama...
L’errance est une notion assez vague. La quête frénétique
d’images peut parfois conduire à entrer dans une certaine errance. Perdre pied,
ne plus savoir dans quelle direction poursuivre sa route. Ne pas prévoir, ne
plus prévoir… Comme le disait Raymond Depardon dans un de ses ouvrages portant
le même nom : « L’errance c’est une conduite sans but déclaré…
une aventure unique, un grand bonheur, une grande liberté. L’aventure de
l’errance m’a permis de vivre dans le présent, d’être assez bien dans le
présent… ».
C’est
peut-être cette errance, aussi relative soit-elle, qui nous a conduits ce
jour-là à Kalimpong. Nous avons fait demi-tour, perdu toute notion du nord et
du sud, du loin et du près. Ici rien n’est pareil, nous sommes sur la même
planète mais nous ne vivons définitivement pas dans le même monde. Perchées sur
les hauts sommets du nord-est de l’Inde, encastrées entre le Népal et le
Bhoutan, les 70 000 âmes qui vivent ici semblent relativement préservées des
assauts ravageurs de la modernité. Sereinement agrippés à la montagne, les
temples bouddhistes saluent paisiblement le vide tout en perçant les nuages. Le
voisin d’en face n’est autre que le Kangchenjunga (le troisième plus haut
sommet de la planète, culminant à 8 586 m), l’un des résidants principaux de
l’Himalaya.
Malgré
la sérénité ambiante, une certaine agitation semble s’être brusquement emparée
des lieux, comme si chacun se préparait à un événement peu commun, à une
célébration… La réponse à notre question ne tardera pas à prendre un nom, celui
de Tenzin Gyatso. Le chef politique et spirituel du peuple tibétain, le 14ème
Dalaï Lama est sur le point de venir ici quelques jours en visite officielle.
Un véritable événement pour toute une communauté, surtout lorsque l’on sait que
sa dernière venue dans cette région de l’Inde remonte à plus de 10 ans.
Voilà
plus d’un demi siècle que l’invasion du Tibet par l’armée chinoise a contraint
l’incarnation du Bodhisattva à l’exil, au même titre que 80 000 pacifistes
tibétains, réfugiés pour la plupart en Inde. Depuis, l’ancien prix Nobel de la
paix ne cesse de prôner de façon pacifique la libération de son pays, en
multipliant les conférences et les rencontres officielles, à travers le monde, avec
les chefs d’Etats qui acceptent de le recevoir malgré la despotique pression
politique qu’exercent sans relâche les dirigeants chinois.
Dans
quelques heures, il sera ici, à Kalimpong, pour les mêmes raisons. Tous les
habitants y vont de leur contribution. On repeint les façades usées par le
temps, on goudronne certaines rues délabrées, partout on nettoie, on range, on
rénove, on décore… Des bannières multicolores s’étirent à perte de vue au
dessus des ruelles, tandis que les messages de paix et de bienvenue fleurissent
sur les murs. Comme un signe prophétique, les drapeaux du Tibet flottent à
nouveau librement par centaines, caressés par l’air pur de l’Himalaya, leurs
couleurs semblent ici ressusciter. Dans le ciel bleu profond, un voile blanc
moiré s’accorde même une petite danse, venant se joindre à la célébration, en
allant effleurer les hauts sommets enneigés…
Progressivement
une longue haie rougeâtre de jeunes moines tibétains, pensionnaires de l’école
bouddhiste voisine ou venus des quatre coins de la région, se déploie de part
et d’autre de la route que leur guide spirituel s’apprête à emprunter d’ici
quelques minutes. Une forêt de drapeaux à prières est apparue, perchée au dessus
de la profonde vallée, laissant le vent souffler les formules sacrées de ces
lungtas à travers les cimes. Peu à peu le temps suspend son cours. Les Mchod-Rols,
instruments tibétains, résonnent et lancent des notes insoupçonnées qui
frappent l’air, se mêlant à une formidable symphonie jouée par les éléments.
Lentement, la spiritualité ambiante s’immisce en chacun de nous sans qu’on en
décide.
Avec
toute la patience et la sérénité du monde, la foule de disciples rend un
hommage mystique au Dalaï Lama qui vient de pénétrer dans l’enceinte du temple
Ganden Tharpa Choling Gompa. Le décompte du temps vient de perdre sa nécessité.
Nous sommes les seuls européens à assister à cette cérémonie sacrée, mais notre
présence ne semble pas susciter un réel étonnement. Dans un véritable océan de
sagesse, entourés d’un cortège de Lamas incarnés d’une saisissante majesté, le
maître tibétain entame un long discours en langue anglaise, en toute humilité.
Il prône le respect mutuel pour présider à toute action, vante les mérites
d’une action pacifiste, il remercie ses hôtes à plusieurs reprises pour
l’accueil qui vient de lui être réservé, se réjouit d’être ici à nouveau,
énonce le programme des jours à venir, et n’hésite pas à faire preuve d’humour
à plusieurs reprises, ce qui ne manque pas de déclencher des rires en cascades
dans l’assemblée. Avant de disparaître derrière les murs épais du monastère
pour entamer la méditation, il salue la foule et ses yeux s’éclairent d’un
dernier sourire. Un véritable bouquet d’espoir et de paix. La route de Lhassa
n’est peut-être pas si loin…
Demain,
portés par la lumière de l’aube nous quitterons ce côté-ci du monde, renforcés
dans notre quête du bonheur par cette rencontre improbable, en tentant de
garder certains de ses enseignements dans un coin de nos têtes : «
Le vrai bonheur ne dépend d'aucun être, d'aucun objet extérieur. Il ne
dépend que de nous... » (Tenzin Gyatso, 14ème Dalaï Lama).
mardi 7 mai 2013
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